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Film "Le consentement"

Le consentement.jpgDe Vanessa Filho avec Jean-Paul Rouve, Kim Higelin, Laetitia Casta

D’après le livre autobiographique de Vanessa Springora

Paris 1985. Vanessa a treize ans lorsqu'elle rencontre Gabriel Matzneff, écrivain quinquagénaire de renom, et en devient malgré elle l'amante. Elle subit de plus en plus violemment l’emprise destructrice que ce prédateur exerce sur elle.

Au temps où les langues se délient, il était utile de montrer en images "l’affaire Matzneff".

Il nous semble hallucinant de nos jours qu’une toute jeune ado puisse tomber sous l’emprise d’un homme de 30 ans son ainé, de surcroît romancier encensé. Il l’initiait aux plaisirs de la chair et cela était au pire plutôt bien, la norme, au mieux le silence. Alors qu’il décrit dans des livres autobiographiques ses rapports sexuels avec des enfants et jeunes adolescents, il se voit auréolé de plusieurs récompenses littéraires.

C’est le portrait d'une omerta incompréhensible de nos jours : emprise intellectuelle puis physique avec l'accord plus ou moins consenti de la mère (Laetitia Casta).

À travers le film de V. Filho, nous comprenons comment, maîtrisant aussi bien la langue française que l'art sournois de la manipulation, l’écrivain (Jean-Paul Rouve) créé chez sa jeune victime (Kim Higelin) une forme de dépendance, poussant sa nouvelle "muse" dans ses griffes ("Non, je ne ferai jamais partie du passé de Vanessa, ni elle du mien."), et la culpabilisant durement si celle-ci venait à remettre en question leur "amour".

Les deux lignes du film sont la manière dont l’époque et la morale s’accommodaient de ce type de pratiques. 

Œuvre utile et inconfortable, ce long métrage décrit ce prédateur (l’ogre lettré) et sa proie (l’enfant douce et fragile). J’ai trouvé le film manquant de force par la direction des comédiens livrant un récit choc sur les abus sur mineurs et ses conséquences sur les victimes. La solitude de la jeune fille, sa fragilité, la mère démissionnaire sont bien montrées. Mais les conséquences sur la construction psychologique, l’autodestruction, le mal-être intense de la jeune victime qui subit un abus monstrueux n’apparaissent que trop en surface.

Quant au titre "Le consentement ", identique au livre que je n’ai pas lu, n’a à mon avis pas de sens, puisqu’il tente de démontrer le non-consentement de la jeune fille : la réalisatrice se focalise sur la dimension de psychopathe calculateur de Matzeff plaçant la jeune ado comme simple victime, bloquant ainsi le débat de consentement qui devrait pourtant être au centre de la réflexion.

Par ailleurs Jean-Paul Rouve surjoue un personnage digne d'un serial killer. Certains passages (son attente à la sortie du collège fixant tel un robot sa proie et retirant ses lunettes noires ; et cette main, sûre d'elle qui s'empare de façon récurrente de ce corps fragile) m’ont donné une sensation de "clichés".

La dernière scène clôt le film et lui donne tout son sens : l’histoire d’un livre sur le point de s’écrire, et dont l’écriture prendra à son propre piège son héros écrivain autant qu’il libèrera ( ?), trente ans après, les faits subis par sa victime innocente.

MartineC

Commentaires

  • Fin 2019, l'annonce de la publication du livre de Vanessa Springora déclenche une polémique. Cet événement entraîne l'ouverture de deux procédures judiciaires contre lui ainsi que l'arrêt de la commercialisation, par ses éditeurs, de ses œuvres.
    Gabriel Matzneff a aujourd'hui 87 ans. Il aura survécu à Denise Bombardier, romancière, laquelle fut la seule à l'affronter et à le stigmatiser, lors d'une célèbre émission littéraire de Bernard Pivot (retransmise dans le film) où il est question d'une époque, pas si lointaine.

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